Article de François Reeves, cardiologue d’intervention au CHUM et à la Cité-de-la-santé de Laval, professeur agrégé de médecine à l’UdeM. Représentant le secteur de la santé, le Dr François Reeves fait maintenant partie du Comité-conseil sur les changements climatiques, élaboré par le Ministère du développement durable, Environnement et Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC).
L’étude du cœur réserve beaucoup de surprises : on y découvre la racine aortique, le tronc commun, les branches marginales et les branches diagonales, l’arborisation coronarienne, les faisceaux de conduction, les feuillets valvulaires et les capillaires. Au-delà de la nomenclature, l’arbre et l’homme sont parents, issus de la différentiation du même organisme, un ancêtre commun, il y a 500 millions d’années. La preuve est dans nos cellules. Il est surprenant et merveilleux de constater que l’hémoglobine et la chlorophylle ont exactement la même structure moléculaire. Ces deux protéines jumelles se distinguent par la présence du fer dans l’hémoglobine et du zinc dans la chlorophylle, leur donnant leur couleur rouge et verte respective, comme par hasard les couleurs complémentaires dans le spectre optique. Dans une perpétuelle partie de tennis moléculaire, elles s’échangent l’oxygène.
Déjà au 18e siècle, Chateaubriand disait: « Les forêts précèdent les hommes, les déserts les suivent ». Pourtant, le grand arbre et l’homme ont une dualité plus qu’importante, une dualité essentielle et vitale. J’ai consacré les trois derniers chapitres de Planète Cœur à exposer les récentes évidences scientifiques des bienfaits de l’arbre pour notre santé cardiovasculaire. L’arbre est notre interface, notre régulateur avec l’air, la terre et l’eau. Avec « intelligence », l’arbre utilise l’énergie solaire pour produire notre oxygène et absorber notre CO2, opération dont découle la synthèse de tous les produits végétaux essentiels à notre vie. Plus des trois quarts des médicaments sont issus des plantes et beaucoup sont à découvrir. Un milieu arborisé est protecteur et régulateur de la température, des excès de vent, de froid et de chaleur, purifie air et eau sans effort, nous protège des îlots de chaleurs urbains et combat les nuisances polluantes. L’argent ne pousse pas dans les arbres. Ils ont mieux à offrir. Pour approvisionner en eau 10 millions de citoyens, la ville de New York se passe d’une station d’épuration d’eau qui lui aurait coûté 5 milliards de dollars, en la puisant dans les monts Catskill, dont les forêts - station d’épuration naturelle - sont protégées. Les demeures les plus recherchées de New York bordent Central Park.
La littérature médicale regorge d’études démontrant les bienfaits de la proximité des arbres dans nos milieux de vie. La pollution augmente la morbidité cardiovasculaire, hors l’arbre est un grand dépollueur. Non seulement il capte des tonnes de CO2 mais aussi les composés organiques volatils toxiques émis par les combustibles fossiles (benzène, aromatiques, ozone). Les particules polluantes sont adsorbées et absorbées par le feuillage, les métabolisant et les rendant inertes.
La vue sur un environnement naturel diminue le séjour de patients en postopératoire et diminue le taux de complications et le besoin en analgésique. Un milieu vert améliore la santé psychique, les troubles d’attention, prédispose et incite aux activités extérieures et physiques. Une vaste étude britannique portant sur 40 millions de sujets a relevé que vivre en milieu vert comparativement à un milieu urbain minéralisé et bétonné diminue la mortalité globale de 6 % et surtout diminue de moitié la différence de mortalité cardiovasculaire observée entre pauvres et riches.
Le 24 septembre 2014, pour une septième année, plusieurs établissements de santé participeront à la Journée de l’Arbre de la santé. Au cours des six dernières années, la Journée de l'Arbre a permis de planter plus de 3000 arbres autour des hôpitaux et centres de santé et cette année, plus de 300 arbres seront plantés chez les partenaires suivants : Cité-de-la-santé de Laval, le CSSS Vallée-de-l’Or, le Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke, le CSSS Dorval-Lachine-LaSalle, le CSSS Lucille-Teasdale, le CSSS Saint-Léonard et Saint-Michel, le CSSS Pierre-Boucher, CSSS Nord-de-Lanaudière et l’Hôpital du Sacré-Coeur. Par ailleurs, en partenariat avec la Soverdi (Société de verdissement du Montréal métropolitain), l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal ainsi que le CSSS Lucille-Teasdale ont procédé au verdissement des terrains de leurs installations au printemps 2014, incluant la plantation de 80 et 97 arbres respectivement. De plus, au CHSLD Rousselot, le CSSS Lucille-Teasdale a créé un grand potager et un Jardin des sens, ainsi qu’un projet de recherche sur la productivité des sols urbains. En accord avec la mission d’un établissement de santé, nous pouvons affirmer que ces institutions veillent activement à diminuer leur empreinte écologique en diminuant la pollution de l’air et ainsi réduire les impacts négatifs que ses opérations génèrent dans l’environnement.
L’INSPQ et Médecins francophones du Canada sont partenaires de cet événement qui, en plus du côté festif pour les membres des établissements hospitaliers et des organismes communautaires associés, verra plusieurs actions et sensibilisations dont l’hôpital vert et les transports actifs.
En cette ère où plus de la moitié de l’humanité vit maintenant dans des villes, protéger dans l’urbanité l’arbre et son milieu est garant de la qualité de notre vie et de notre santé. L’arbre a de tout temps été l’allié de l’homme. Il est plus que beau. Il est vital de le reconnaître comme partenaire essentiel, de le préserver et de l’intégrer activement dans nos milieux de vie.
Quelques liens utiles :